jeudi 30 mai 2013

Notre monde est devenu complexe

La manière dont on perçoit le Monde est intimement liée à l’état d’avancement des connaissances scientifiques. Force est de constater que nous sommes tous conditionnés par notre croyance dans le fait que notre Monde, celui de Newton et de Descartes, est linéaire.

Pourtant la science nous éloigne chaque jour d’avantage de ce modèle simpliste. La Théorie de la Relativité d’Einstein, la Mécanique Quantique, et la Théorie du Chaos, sont autant de découvertes récentes qui auraient du changer radicalement notre manière de voir le monde. Il n’en est rien. Notre quotidien n’a pas encore intégré ces concepts scientifiques nouveaux et difficiles. Nous n’avons pas encore tous bien cerné les changements qui s’annoncent.

Le monde est de plus en plus complexe, fractal, ou plus exactement, grâce aux découvertes scientifiques, nous sommes de plus en plus à même de le découvrir ainsi. Là est bien l’enjeu : nos relations et interactions avec le Monde ont changé de nature, car la science a changé notre perception du monde, ou du moins nous a rendu capable le voir différemment. Sans le savoir encore, nous nous affranchissons de la logique linéaire et cartésienne au profit d’un modèle systémique plus complexe, plus désordonné.

Dans ces conditions où l’Humanité toute entière manque de recul, où tout ce que nous considérons comme acquis se voit remis en question, comment repérer et accompagner les changements ? Il me semble que c'est là tout notre travail de citoyen.


mercredi 29 mai 2013

Erik Johanssson (1985-)

Erik Johansson est un Suédois qui excelle dans la photo-manipulation. Originales, rafraîchissantes, ses retouches allient réel et imaginaire, et sont parfois teintées de gaming-culture.

Il crée des photos réalistes de scènes impossibles, en capturant l'idée, pas le moment. Dans cette présentation pleine d'esprit, le magicien de Photoshop décrit les principes qu'il utilise pour donner vie à ces fantastiques scénarios, tout en les gardant visuellement plausibles.

Lien vers le site de l’artiste : http://erikjohanssonphoto.com/

Go your own road

Stryktalig

Roadworkers coffebreak


Kaffeslump

Vertical Turn

Erik Johansson

Né en 1985 et ayant grandi dans une ferme située à Götene (Suède) auprès de ses parents et deux jeunes sœurs, Erik commence d’abord par exprimer ses idées à travers un papier-crayon. Ensuite, à l’âge de 15 ans, il reçoit son premier appareil photo qui lui fait rapidement  découvrir les joies de la photographie mais qui au même passage,  habitué au pouvoir d’établir les règles avec le dessin, développe en lui un certain sentiment de frustration vis-à-vis des restrictions imposées par la photographie classique. C’est à ce moment-là qu’Erik se met à s’intéresser à la photo-manipulation et s’amuse à modifier ses propres photos sur son ordinateur.

Quelques années plus tard en 2005, Erik s’installe à Gothenburg pour poursuivre un master en informatique pour ensuite enchaîner  sur un master en design numérique à l’université Chalmers de technologie. C’est pendant cette période-là alors qu’il publie pour la première fois quelques-unes de ces photos dans le web, résultat : Le succès est immédiat, des agences de publicité s’empressent les jours qui suivent à le contacter pour des collaborations futures.

Aujourd’hui, Erik a décidé de se consacrer à plein temps à sa passion en devenant photographe freelance basé à Berlin. Selon lui afin de constituer une image, aller d’une dizaine de calques jusqu’à 1000 importe très peu. Dans son cas à lui, figer des instants uniques de la vie ne l’intéresse pas, il se sert plutôt de son outil de travail pour assembler séparément un nombre d’éléments qui l’aideront à concrétiser avec une idée, tout cela bien sûr avec un résultat réaliste au possible. Désormais, pour Erik, la prochaine étape serait de s’attaquer à l’animation ou réalisation de courts métrages.


Mind your step - Juin 2011 Place Sergel, Stockholm


Erik Johansson - Impossible photography, Video on TED.com

lundi 20 mai 2013

De Gutenberg au livre numérique

Depuis 1440 date de l'invention de l'imprimerie, par Gutenberg, mettant en exergue une révolution dans la reproduction et la fabrication des livres, jusqu'à aujourd'hui, le milieu du livre s'était reposé sur une technologie simple : le papier. Mais l'âge numérique bouscule, agite, perturbe, comme le démontre l'infographie suivante.

Avec une conclusion simple : n'importe qui peut devenir "publieur" de livre avec l'édition numérique. Search News Media présente ainsi une intéressante évolution, confrontant le monde de l'impression, tel qu'il s'est développé depuis six siècles. 

Dale Lovell, directeur de la publication de Search News Media commente : « L'édition a considérablement changé au cours des siècles. Nous avons pensé que cette infographie était une excellente manière d'illustrer ces modifications. Aujourd'hui, avec l'avènement des plateformes d'auto-édition et les canaux de distribution, à travers les médias sociaux, toute personne, entreprise ou marque peut devenir un éditeur, sans rencontrer trop d'obstacles. »

Source: Search News Media

mercredi 15 mai 2013

Yes Man (film) - Peyton Reed (1964-)

Yes Man (2009) - Peyton Reed

Carl Allen est au point mort. No future... jusqu'au jour où il s'inscrit à un programme de développement personnel basé sur une idée toute simple : dire oui à tout ! Carl découvre avec éblouissement le pouvoir magique du "Yes", et voit sa vie professionnelle et amoureuse bouleversée du jour au lendemain : une promotion inattendue, une nouvelle petite amie... Mais il découvrira bientôt que le mieux peut être l'ennemi du bien, et que toutes les occasions ne sont pas bonnes à prendre...

Dire oui à la vie, c’est dire non

Dire oui à la vie, c’est dire oui à ce qui est vrai en nous, acquiescer à nos aspirations profondes. C’est souvent dire non aux conventions sociales, dire non aux attentes et projections d’autrui, dire non aux habitudes et aux sécurités.

Nous croyons trop facilement que si chacun faisait ce qui lui plaît, la société ne fonctionnerait plus. C’est oublier la diversité humaine. Notre aventure personnelle n’est pas forcément grandiose ou exotique. A chacun ses désirs, à chacun son rêve.

Seulement, toutes sortes de craintes nous assaillent : allons-nous réussir ?  Et pourquoi ne pas tenter ? Quels sont les risques réels (et non fantasmés) ? Une chose est certaine, on ne regrette jamais d’avoir dit oui à la vie, même en cas d’échec. Quand on est dans la dynamique du rêve, on se sent vivant. Comment savoir si le chemin est juste ? Quand on dit oui à la vie, la fatigue s’envole, les tensions s’évaporent.


Bande annonce du film "Yes Man" 2009

dimanche 12 mai 2013

Déclaration pour une éthique planétaire


Pour la première fois dans l'histoire religieuse paraît un Déclaration d'éthique planétaire qui propose non pas un consensus interreligieux réduit au minimum, mais une reconnaissance des normes indispensables et des valeurs universelles.

Sans cette reconnaissance, un « ordre mondial durable » serait rendu impossible. La « Déclaration pour une éthique planétaire » a été adoptée par des représentants des religions du monde entier au cours d'une assemblée du « Parlement des religions du monde » (Chicago, sept. 1993).


Déclaration pour une éthique planétaire

Introduction
  
Cette introduction a été composée à Chicago par le « Conseil » du Parlement des religions du monde, à partir de la déclaration rédigée à Tübingen et présentée sous le titre « Les principes d’une éthique planétaire ». Elle constitue un résumé de la déclaration en vue d’une large diffusion par les médias. 

Le monde est à l’agonie, agonie à ce point généralisée et dramatique que nous nous sentons pressés d’en indiquer les diverses manifestations afin de mettre en lumière la gravité de notre préoccupation. 
La paix nous échappe ; la destruction de la planète se poursuit ; des gens vivent dans la peur de leurs voisins ; des hommes et des femmes se sont opposés les uns aux autres ; des enfants meurent! 
Cette situation est abominable! 
Nous condamnons l’abus de l’écosystème de notre planète. 
Nous condamnons la pauvreté qui étouffe les chances de vie ; la famine qui affaiblit les forces physiques ; les inégalités économiques qui menacent tant de familles. 
Nous condamnons le désordre social qui règne dans nos pays ; le mépris de la justice qui refoule des citoyens dans la marginalité ; l’anarchie qui s’installe dans nos collectivités ; et la violence qui frappe des enfants d’une mort absurde. Nous condamnons en particulier l’agressivité et la haine semées au nom de la religion. 
Or, cette agonie n’est pas une fatalité. 
Elle n’est pas une fatalité parce que la base d’une éthique existe déjà. Cette éthique offre la possibilité d’un meilleur ordre individuel et mondial : elle arrache les individus au désespoir et protège nos sociétés du chaos. 
Nous sommes des hommes et des femmes qui embrassent les commandements et la pratique des religions du monde. 

Nous affirmons que ces religions partagent dans leurs enseignements un noyau commun de valeurs essentielles qui constituent le fondement d’une éthique planétaire. 
Nous affirmons que cette vérité est déjà reconnue, mais il reste encore à la vivre dans nos cœurs et dans nos actes. 
Nous affirmons qu’une règle irrévocable et inconditionnelle existe dans tous les domaines de la vie, pour les familles et les collectivités, les diverses ethnies, nations et religions. Depuis les temps anciens les religions du monde enseignent des lignes directrices pour le comportement des humains, lesquelles sont la condition d’un ordre mondial durable. 


Nous le déclarons : 

Nous vivons toutes et tous en étroite interdépendance. Chacun et chacune d’entre nous dépend du bien-être de l’ensemble. C’est pourquoi nous avons du respect pour tous les êtres vivants, les hu-mains, les animaux et les plantes ; nous nous préoccupons de la sauvegarde de la planète, de l’air, de l’eau et du sol. 
Chacun et chacune de nous est personnellement responsable de tous ses actes. Toutes nos décisions, nos actions et nos omissions sont lourdes de conséquences. 
Nous devons traiter les autres comme nous souhaitons être traités par eux. Nous nous engageons à respecter, sans aucune exception, la vie, la dignité, l’individualité et la diversité d’autrui, de sorte que chaque personne sera ainsi traitée humainement. Il nous faut manifester une attitude patiente et accueillante. Nous devons être capables de pardonner : pour cela nous devons apprendre les leçons du passé, sans pour autant rester prisonniers des mémoires de haine. Dans la mesure où nous ouvrons nos cœurs les uns aux autres, il nous faut abandonner nos querelles mesquines en faveur de la communauté mondiale et mettre ainsi en pratique une culture de solidarité et de relations mutuelles. 

Nous considérons l’humanité toute entière comme notre famille. Nous devons faire des efforts pour nous montrer amicaux et généreux. Nous ne devons pas nous replier sur nous-mêmes ; il nous faut au contraire nous mettre au service des autres et ne jamais oublier les enfants, les personnes âgées, les pauvres, les malades, les handicapés, les réfugiés et les personnes solitaires. Personne ne doit jamais être considéré ou traité comme un citoyen de seconde zone, ni exploité de quelque manière que ce soit. Un partenariat équitable doit caractériser la relation entre l’homme et la femme. Tout comportement sexuel immoral doit être banni. Il nous faut renoncer à toute forme de domination et d’abus. 

Nous nous engageons à bâtir une culture de non-violence, de respect, de justice et de paix. Nous refusons d’opprimer, de blesser, de torturer ou de tuer aucun être humain et nous renonçons à utiliser la violence comme moyen de résolution de conflits. 

Nous devons faire des efforts afin d’instaurer un ordre social et économique juste, au sein duquel chacun jouisse des mêmes chances de développer tout son potentiel humain. Il nous faut parler et agir vrai et avec sympathie, dans une relation ouverte et franche avec tous, rejetant les préjugés et évitant toute manifestation de haine. Nous ne commettrons pas de vol. Au contraire, il nous faut surmonter la quête de pouvoir ou de prestige, la soif d’argent et le consumérisme afin de bâtir un monde de justice et de paix. 

Il est illusoire de vouloir rendre cette planète meilleure, sans changer d’abord la conscience des individus. Nous nous engageons dès lors à élargir notre capacité de perception, en acceptant pour notre esprit une discipline de méditation, de prière ou de pensée positive. Si nous n’acceptons pas des risques et des sacrifices, notre condition actuelle ne changera pas en profondeur. C’est pourquoi nous nous engageons à vivre selon cette éthique planétaire, dans la compréhension mutuelle, selon des modes de vie propres à promouvoir le bienêtre de la société, la paix et le respect de la nature. 

Nous invitons tous les êtres humains, croyants ou non, à prendre le même engagement.
  

Principes d’une éthique planétaire
  
Notre monde traverse une crise fondamentale : une crise de l’économie, de l’écologie et de la politique mondiales. Partout on déplore l’absence d’une grande vision, l’accumulation de problèmes irrésolus et la paralysie de la politique gérée par des politiciens médiocres qui sont le plus souvent insuffisamment préoccupés du bien commun et manquent d’intelligence et de prospective. Pour relever les défis nouveaux, on ne propose que trop de réponses surannées. 
Sur notre planète, des centaines de millions d’êtres humains souffrent chaque jour davantage du chômage, de la pauvreté et de la destruction de la famille. L’espoir d’une paix durable entre les peuples s’estompe une fois de plus. Il existe des tensions entre les sexes et les générations. Des enfants meurent, tuent ou sont tués. De plus en plus nombreux se comptent les Etats secoués par des affaires de corruption politique ou économique. La cohabitation pacifique devient chaque jour plus difficile dans nos villes, à cause des conflits sociaux, raciaux et ethniques, de la drogue, du crime organisé et même de l’anarchie. Même des voisins vivent souvent dans la peur l’un de l’autre. Notre planète est constamment livrée au pillage sauvage. Elle est menacée de l’effondrement de son écosystème. 
Nous voyons toujours à nouveau des chefs religieux et leurs adeptes attiser l’agression, le fanatisme, la haine et la xénophobie ; ils vont jusqu’à inspirer et justifier des conflits violents et sanglants. On abuse souvent de la religion comme simple instrument de pouvoir politique et on l’exploite à des fins guerrières. Tout cela nous dégoûte. 
Nous dénonçons toutes ces abominations et nous proclamons que cela ne doit pas être. Les enseignements des religions du monde véhiculent d’ores et déjà une éthique qui pourrait contrer la détresse qui règne dans le monde. Bien sûr, cette éthique ne propose pas de solution immédiate à tous les problèmes gigantesques de la planète ; mais elle nous offre l’assise morale d’un meilleur ordre individuel et collectif : une vision propre à arracher les hommes et les femmes au désespoir ; une éthique capable aussi de protéger nos sociétés du chaos qui les menace. 

Nous sommes des hommes et des femmes qui embrassent les commandements et la pratique des religions du monde. Nous affirmons qu’un consensus existe déjà parmi les religions, susceptible de fonder une éthique planétaire : un consensus minimal concernant des valeurs contraignantes, des normes irrévocables et des attitudes morales essentielles. 
  
I. Pas de nouvel ordre mondial sans une éthique planétaire
  
Hommes et femmes de religions et de régions diverses de cette planète, nous nous adressons donc à tous les humains, religieux ou non. Nous voulons exprimer notre conviction commune : 
• Tous, nous portons la responsabilité d’un meilleur ordre mondial.
• Il est absolument nécessaire que nous nous engagions au service des droits hu-mains, de la liberté, de la justice, de la paix et de la sauvegarde de la planète. 
• La diversité de nos traditions religieuses et culturelles ne saurait nous empêcher de nous dresser ensemble activement contre toute forme d’inhumanité et de promouvoir plus d’humanité. 
• Les principes énoncés dans cette déclaration peuvent être affirmés par tous les êtres humains qui sont animés d’une éthique, qu’elle soit basée sur une religion ou non. 
• En raison même de notre orientation religieuse et spirituelle, nous fondons notre existence sur une réalité ultime dans laquelle, dans la confiance, la prière ou la méditation, à haute voix ou dans le silence, nous puisons force et espoir. Nous avons dès lors une responsabilité particulière pour le bienêtre de l’humanité tout entière et pour la planète Terre. Nous ne nous considérons pas meilleurs que les autres, mais nous avons confiance que l’antique sagesse de nos religions saura baliser aussi les chemins de l’avenir. 

Après deux guerres mondiales et la guerre froide, après l’écroulement du fascisme et du nazisme, l’ébranlement du communisme et du colonialisme, l’humanité est entrée dans une nouvelle ère de son histoire. Nous posséderions aujourd’hui assez de ressources économiques, culturelles et spirituelles pour promouvoir un meilleur ordre mondial. Pourtant d’anciennes et récentes tensions ethniques, nationales, sociales, économiques et religieuses compromettent la construction pacifique d’un mon-de meilleur. Notre temps connaît des progrès scientifiques et techniques inouïs. Mais les faits sont là : à l’échelon de la planète, la pauvreté, la faim, la mortalité enfantine, le chômage, la misère et la destruction de la nature ne diminuent pas, mais s’aggravent. La ruine économique menace beaucoup de peuples, et parallèlement se défait le tissu social, se profilent la marginalisation politique, la catastrophe écologique et l’écroulement de la nation. 

La situation du monde étant si dramatique, l’humanité a besoin d’une vision de cohabitation pacifique des peuples et de l’exercice de la responsabilité commune des groupes ethniques et éthiques et des religions pour la planète Terre. Une vision repose sur des espoirs, des objectifs, des idéaux, des critères, lesquels, un peu partout dans le monde, ont malheureusement tendance à nous échapper de plus en plus. Pourtant, nous sommes convaincus que c’est précisément la responsabilité des religions, en dépit de leurs abus et de leurs défaillances si fréquentes au cours de l’histoire, de démontrer que ces espoirs, ces idéaux et ces critères peuvent être sauvegardés, fondés et réalisés. Cela vaut plus spécialement pour les Etats modernes : des conditions sont nécessaires afin de garantir la liberté de conscience et de religion, mais ces libertés seules ne sauraient remplacer les valeurs contraignantes, les convictions et les normes qui valent pour tout un chacun, quels que soient l’origine sociale, le sexe, la couleur de la peau, la langue ou la religion. 

Nous sommes convaincus que l’humanité sur notre planète forme une seule famille. Pour cette raison nous rappelons la Déclaration universelle des droits humains, proclamée par les Nations Unies en 1948. Ce que ce texte a solennellement proclamé au plan du droit, nous voulons ici le confirmer et l’approfondir au niveau de l’éthique : la pleine réalisation de la dignité intrinsèque de la personne humaine, sa liberté inaliénable, le principe de l’égalité de tous les êtres hu-mains, la solidarité indispensable et l’interdépendance de tous. 

A travers nos expériences personnelles et l’histoire douloureuse de notre planète nous avons appris : 
• un meilleur ordre mondial ne peut se construire ni être imposé par des lois, des ordonnances ou des conventions seules ; 
• la réalisation de la paix, de la justice et de la sauvegarde de la planète dépend de personnes disposées à faire valoir le droit ; 
• l’engagement en faveur des droits et libertés suppose la conscience des responsabilités et devoirs ; il faut, par conséquent, toucher la tête et le cœur des personnes ; 
• sans moralité, les droits risquent de ne pas durer. Il n’y aura donc pas de nouvel ordre mondial sans une éthique planétaire. 

Par éthique planétaire nous n’entendons ni une nouvelle idéologie ni une religion mondiale unitaire au-delà de toutes les religions existantes ; moins encore la domination d’une religion sur les autres. Ethique planétaire signifie pour nous le consensus fondamental par rapport aux valeurs contraignantes, aux critères irrévocables et aux attitudes essentielles de la personne. Sans un tel consensus éthique radical, chaque communauté court tôt ou tard le risque du chaos ou de la dictature, et les individus sombrent dans le désespoir.
  
II. Une exigence fondamentale : que toute personne humaine soit traitée humainement
  
Nous sommes tous et toutes faillibles, im-parfaits, marqués par nos limites et nos carences. Nous connaissons la réalité du mal. C’est précisément pourquoi, soucieux du bien-être planétaire, nous nous sentons obligés d’expliciter les éléments fondamentaux d’une éthique planétaire, tant pour les individus que pour les collectivités et les organisations, pour les Etats comme pour les religions elles-mêmes. En effet, nous sommes convaincus que nos traditions religieuses et éthiques, dont certaines remontent à plusieurs millénaires, véhiculent une éthique accessible et viable pour toutes les personnes de bonne volonté, croyantes ou non. 

En même temps nous nous rendons parfaitement compte que les critères qui permettent de distinguer ce qui sert l’être humain de ce qui peut lui nuire, ce qui est juste de ce qui est injuste et le bien du mal, varient selon les différentes traditions religieuses et éthiques. Il ne s’agit pas d’estomper ou de gommer les caractéristiques propres, et souvent profondes, de chaque religion particulière. Elles ne doivent pourtant pas nous empêcher de proclamer bien haut ce que nous partageons et affirmons déjà en raison de nos fondements religieux et éthiques respectifs. 

Il nous paraît clair aussi que les religions ne sont pas à même de résoudre les problèmes écologiques, économiques, politiques et sociaux de la planète. Au moins peuventelles obtenir ce que les plans économiques, les programmes politiques et les régulations légales sont incapables de réaliser seuls : la modification des attitudes intimes et des mentalités, c’est-à-dire le changement du « cœur » des êtres humains et leur conversion qui les amènera à quitter le mauvais chemin pour suivre une nouvelle orientation de vie. Sans aucun doute, l’humanité a besoin de réformes sociales et écologiques ; mais elle demande avec non moins d’urgence un renouvellement spirituel. En raison de notre propre orientation religieuse et spirituelle, nous nous consacrerons particulièrement à cette tâche, conscients du fait que les énergies spirituelles des religions peuvent précisément offrir la confiance fondamentale, l’horizon de sens, les critères ultimes et une patrie spirituelle. Cependant, les religions ne seront crédibles que pour autant qu’elles renoncent à tout conflit dont elles seraient elles-mêmes la source ; c’est-à-dire dans la mesure où, au contraire, elles abandonnent toute présomption, méfiance, préjugés et stéréotypes hostiles, et manifestent du respect pour les traditions, les sanctuaires, les fêtes et les rites des autres croyants.

Aujourd’hui comme par le passé, partout sur la planète des êtres humains sont encore traités de façon inhumaine. Ils sont privés de leurs chances de vie et de leur liberté ; leurs droits humains sont foulés aux pieds et leur dignité n’est pas respectée. Mais la force n’est pas le droit! Face à tout comportement inhumain, nos convictions religieuses et éthiques exigent que toute personne humaine soit traitée humainement! 

Qu’est-ce à dire? Sans considérations d’âge, de sexe, de race, de couleur de peau, d’aptitude physique ou mentale, de langue, de religion, d’orientation politique, d’origine nationale ou sociale – toute personne humaine possède une dignité inaliénable et inviolable. Tous sont donc tenus, les individus comme les Etats, de respecter et de protéger cette dignité. En matière économique ou politique, dans les médias, les instituts de recherche et les entreprises industrielles, l’être humain sera toujours considéré comme le sujet de droits et comme une fin en soi, jamais comme un simple moyen ou un objet au service du commerce et de l’industrie. Personne n’est jamais « au-delà du bien et du mal » : ni l’individu, ni la classe sociale, ni le groupe d’intérêt, ni le cartel, ni l’appareil policier, ni l’armée, ni l’Etat. Au contraire, douée qu’elle est de raison et de conscience, toute personne humaine est obligée de se comporter humainement, jamais inhumainement : faire le bien et éviter de faire le mal! 

Notre déclaration veut expliciter le sens concret de cette exigence. Nous entendons rappeler des normes éthiques irrévocables et absolues. Ces normes ne devraient ni entraver ni enchaîner les personnes, mais plutôt les aider dans leur recherche afin qu’elles puissent retrouver et réaliser de nouveau les valeurs, l’orientation et le sens de leurs vies.

Un principe s’est maintenu depuis des millénaires dans beaucoup de traditions religieuses et éthiques de l’humanité ; c’est la « règle d’or » : Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse. Ou, exprimée de façon positive : Agis à l’égard des autres comme tu souhaites qu’on agisse à ton égard! Cela devrait être la norme irrévocable et absolue dans tous les domaines de la vie, pour les familles et les collectivités, les ethnies, nations et religions.

Les égoïsmes de toute sorte, individuels ou collectifs, sont à rejeter, qu’ils apparaissent sous forme de préjugés de classe, de racisme, de nationalisme ou de sexisme. Nous les condamnons, car ils forment un obstacle qui empêche les êtres humains d’être authentiquement humains. L’affirmation ou la réalisation de soi sont parfaitement légitimes – tant qu’elles ne sont pas séparées de la responsabilité vis-à-vis de soi et du monde, c’est-à-dire de la responsabilité pour le prochain et pour la planète Terre. 

Ce principe contient des critères très concrets auxquels nous devons rester fidèles. Il en découle quatre très anciennes lignes directrices qui se retrouvent dans la plupart des religions.
  

III. Quatre directives irrévocables
   
I. L’engagement en faveur d’une culture de la non-violence et du respect de la vie
  
Dans toutes les régions et dans toutes les religions, d’innombrables personnes font des efforts pour mener une vie qui, loin d’être guidée par l’égoïsme, s’investit au contraire au bénéfice du prochain et de l’environnement. Et pourtant le monde d’aujourd’hui est encore plein de haine, d’envie, de jalousie et de violence : non seulement entre les individus, mais encore entre les groupes sociaux et ethniques, les classes, les cultures, les nations et les religions. La violence, le commerce de la drogue, le crime organisé, qui se servent souvent des moyens techniques les plus modernes, connaissent une extension planétaire. En de nombreuses régions, c’est encore la terreur « d’en haut » qui règne ; des dictateurs agressent leur propre peuple et la violence institutionnalisée est largement répandue. Dans certains pays, bien que la loi y prétende protéger les libertés individuelles, des prisonniers sont torturés, des hommes et des femmes mutilés, des otages tués. 

A. Dans les grandes et anciennes traditions religieuses et éthiques de l’humanité, nous trouvons cette injonction : tu ne tueras pas! Ou, dans sa version positive : respecte la vie! Reprenons donc aujourd’hui les conséquences de cette antique directive : tout être humain a droit à la vie, à l’intégrité corporelle et au libre épanouissement de sa personne, tant qu’il ne lèse pas les droits d’autrui. Personne n’a le droit de torturer physiquement ou psychiquement, de blesser, a fortiori de tuer un autre être humain. Aucun peuple, aucun Etat, aucune race, aucune religion n’a le droit de discriminer, de « nettoyer », d’exiler ou de liquider une minorité qui pense ou croit autrement. 

B. Sans doute, des conflits vont toujours surgir là où des humains coexistent. Mais de tels conflits devraient être résolus de manière non violente, dans un cadre légal imprégné de justice. Cela vaut pour les individus comme pour les Etats. Les dirigeants politiques doivent observer les prescriptions du droit et rechercher autant que possible des solutions non violentes et pacifiques. Ils devraient s’engager dans ce sens aussi dans le cadre d’un ordre international de paix qui a lui-même besoin d’être protégé et défendu contre des acteurs de violence. L’armement est la mauvaise voie ; le désarmement est le commandement de l’heure qu’il est. Il faut être lucide : il n’y aura pas de survie pour l’humanité sans paix mondiale! 

C. C’est pourquoi les jeunes doivent apprendre en famille et à l’école que la violence ne peut être un moyen de résoudre des conflits avec autrui. C’est ainsi seulement qu’on pourra créer une culture de la non-violence.

D. La personne humaine est infiniment précieuse : elle doit être absolument protégée. Mais les animaux et les plantes, qui partagent avec nous cette planète, méritent eux aussi protection, égards et sollicitude. L’exploitation effrénée des fondements naturels de la vie, la destruction sauvage de la biosphère et la militarisation du cosmos sont des méfaits. Comme êtres humains, attentifs surtout aux générations à venir, nous portons une responsabilité particulière pour la planète Terre et le cosmos tout entier, air, eau et sol. Nous sommes tous ensemble tissés dans la trame de ce cosmos, en étroite dépendance réciproque. Chacun de nous dépend du bien-être de l’ensemble. Il s’ensuit que ce n’est pas la domination de l’être humain sur la nature et le cosmos qu’il faut promouvoir, mais plutôt sa communion avec la nature et le cosmos. 

E. Selon l’esprit de nos grandes traditions religieuses et éthiques, être vraiment humain revient à se montrer plein d’égard pour les autres et prêt à les servir, tant dans la vie privée que dans la vie publique. Nous ne devrions jamais être irresponsables ou brutaux. Chaque peuple, chaque culture, chaque religion doit manifester de la tolérance, du respect, et même de l’estime pour les autres peuples, cultures ou religions. Culturelles, ethniques ou religieuses, les minorités ont droit à la protection et au soutien.
  
2. L’engagement en faveur d’une culture de la solidarité et d’un ordre économique juste
  
Dans toutes les régions et toutes les religions, d’innombrables personnes s’efforcent de mener une vie dans la solidarité mutuelle et de travailler dans la fidélité à ce que leur profession leur demande. Pourtant le monde d’aujourd’hui est encore plein de famine, de pauvreté et de misère. Les individus ne sont pas seuls responsables de cette situation. Très souvent la faute vient des structures injustes de nos sociétés : des millions d’êtres humains sont sans travail ; des millions de travailleurs sont exploités par un travail mal payé, poussés dans la marginalité, privés de toute perspective d’avenir. Dans beaucoup de pays, des disparités immenses existent entre les pauvres et les riches, entre ceux qui détiennent le pouvoir et ceux qui en sont exclus. Dans notre mon-de, le capitalisme débridé et le socialisme totalitaire ont miné, voire détruit beaucoup de valeurs éthiques et spirituelles : une mentalité matérialiste est à l’origine de la soif illimitée du profit et la cupidité se répand sans frein. On exige de plus en plus des ressources de la collectivité sans pour autant obliger les individus à contribuer davantage. Aussi bien dans les pays en développement que dans les pays industrialisés, le cancer de la corruption a envahi la société.

A. Dans les grandes et anciennes traditions religieuses et éthiques de l’humanité, nous trouvons cette injonction : tu ne voleras pas! Ou, dans sa version positive : agis avec droiture et honnêteté. Reprenons donc aujourd’hui les conséquences de cette antique directive : personne n’a le droit de voler ou d’attenter, de quelque manière que ce soit, à la propriété d’une personne ou de la collectivité. Inversément, personne n’a le droit de gérer ses biens sans égard pour les besoins de la société et de la planète.

B. Dans des conditions d’extrême pauvreté, des sentiments d’impuissance et de désespoir se répandent : pour survivre, on en vient alors fréquemment à voler. L’accumulation sauvage de puissance et de richesse déclenche fatalement chez les défavorisés et les marginaux des réactions d’envie ou de ressentiment, voire de haine meurtrière et de révolte. On entre alors dans une spirale de violence. Il faut être lucide : il ne peut y avoir de paix mondiale sans justice mondiale.

C. C’est pourquoi les jeunes doivent apprendre en famille et à l’école que la propriété, si modeste soit-elle, implique des devoirs. Dans son usage, il faut aussi penser au bien commun. C’est ainsi seulement que l’on bâtira un ordre économique juste.

D. S’il s’agit d’améliorer le sort des milliards de pauvres sur la planète, et notamment des femmes et des enfants, il faut restructurer l’économie mondiale dans le sens de plus de justice. Pour indispensable qu’ils soient, les projets d’aide ponctuelle et la bienfaisance des individus isolés ne peuvent suffire. Il faut la participation de tous les Etats et l’autorité des organisations internationales pour bâtir des institutions économiques justes. 

Les problèmes de la dette et de la pauvreté du « Deuxième Monde » en voie de dissolution – et plus encore du « Tiers Monde » – doivent trouver une solution acceptable pour toutes les parties. Les conflits d’intérêt seront sans doute inévitables. Dans les pays développés, il faut distinguer entre consommation nécessaire et consommation effrénée, entre usage social et non social de la propriété, entre utilisation justifiée et non justifiée des ressources naturelles, et entre une économie de marché tournée exclusivement vers le profit et sa version sociale et écologique. Les pays en voie de développement sont eux aussi appelés à faire cet exercice de conscientisation. 

Là où les gouvernants répriment les gouvernés, où les institutions menacent les personnes, où le pouvoir opprime le droit, nous avons l’obligation de résister, si possible dans la non-violence.

E. Selon l’esprit de nos grandes traditions religieuses et éthiques, être vraiment humain se traduit donc comme suit : 
• Nous devons mettre le pouvoir économique et politique au service de l’humanité au lieu d’en abuser dans une lutte sauvage pour la domination ; il nous faut cultiver l’esprit de compassion pour ceux qui souffrent et développer une sollicitude particulière pour les pauvres, les handicapés, les personnes âgées, les réfugiés et les solitaires ; 
• nous devons cultiver le respect mutuel afin d’aboutir à un équilibre raisonnable des intérêts, au lieu du souci exclusif du pouvoir illimité et de la compétition acharnée ; 
• nous devons valoriser le sens de la mesure et de la modestie plutôt que la soif inassouvie de l’argent, du prestige et de la consommation. En effet, en cédant à ses désirs inassouvis, l’être humain perd son âme, sa liberté, sa sérénité et sa paix intérieure, cela précisément qui constitue son humanité. 
  
3. L’engagement en faveur d’une culture de la tolérance et d’une vie véridique
  
Dans toutes les régions et dans toutes les religions d’innombrables personnes s’efforcent de mener une vie dans la loyauté et la vérité. Et pourtant, le monde d’aujourd’hui est encore plein de mensonges et de tromperies, d’escroqueries et d’hypocrisie, d’idéologies et de démagogie : 
• Il est des politiciens et des hommes d’affaires qui se servent du mensonge comme instrument sur la voie du succès ; 
• il est des médias qui remplacent le reportage objectif par la propagande idéologique, ou l’information par la désinformation, la simple vérité loyalement exposée par un cynique intérêt commercial ;
• il est des scientifiques et des chercheurs qui se font les otages de programmes idéologiques ou politiques, ou de groupes dirigés par l’intérêt économique, dont on peut questionner la moralité, ou qui justifient des recherches lésant des valeurs éthiques fondamentales ; 
• il est des représentants religieux qui accordent une valeur moindre aux autres croyances et qui prêchent le fanatisme et l’intolérance au lieu du respect et de la compréhension mutuelle. 

A. Dans les grandes et anciennes traditions religieuses et éthiques de l’humanité, nous trouvons cette injonction : tu ne mentiras pas! Ou, dans sa version positive : parle et agis de bonne foi! Reprenons donc aujourd’hui les conséquences de cette antique directive : il n’est pas d’être humain, ni d’institution, ni d’Etat, ni d’Eglise ou de communauté religieuse qui puisse s’arroger le droit de proférer des mensonges. 

B. Cela vaut en particulier : 
• Pour celles et ceux qui travaillent dans les médias : nous leur confions la liberté d’information au service de la vérité et ainsi nous leur accordons une fonction de surveillance. Ils ne sont pas placés au-dessus de la morale mais ont l’obligation de respecter la dignité des personnes, les droits humains et les valeurs essentielles ; ils doivent être guidés par le souci de l’objectivité et du tact. Ils n’ont pas le droit de faire intrusion dans la vie privée des individus, de manipuler l’opinion publique ou de déformer la vérité ; 
• pour les artistes, les écrivains et les scientifiques : nous leur confions la liberté artistique et académique. Ils ne sont pourtant jamais exempts des normes éthiques générales mais doivent servir la vérité ; 
• pour les dirigeants des pays, les politiciens et les partis politiques : nous leur confions notre propre liberté. Quand ils mentent ouvertement en face de leurs peuples, quand ils manipulent la vérité, quand ils cèdent à la corruption ou mènent une politique de puissance pure et dure, leur crédibilité est ruinée ; ils méritent de perdre leur mandat et d’être abandonnés par leurs électeurs. A l’inverse, les hommes et femmes politiques qui ont le courage de parler toujours vrai doivent être soutenus par l’opinion publique ; 
• pour les représentants des religions enfin : quand ils répandent des préjugés ou attisent la haine et l’hostilité contre des croyants d’autres religions, ou quand ils incitent même à des guerres de religion ou les justifient, ces personnes méritent d’être condamnées par l’humanité et d’être rejetées par leurs coreligionnaires.

Il faut être lucide : il n’y aura pas de justice mondiale sans droiture et loyauté entre les êtres humains!

C. C’est pourquoi les jeunes doivent apprendre en famille et à l’école comment penser, parler et agir vrai. Ils ont droit à l’information nécessaire et à l’éducation, afin de pouvoir faire les choix décisifs qui vont façonner leur vie. Sans une orientation éthique de base, on ne dispose guère de moyens pour distinguer l’essentiel de l’accessoire. Dans le flot quotidien de l’information, les critères éthiques aident à discerner quand des opinions personnelles sont présentées comme des faits, des intérêts camouflés, des tendances exagérées et des faits déformés. 

D. Selon l’esprit de nos grandes traditions religieuses et éthiques, être vraiment humain se traduit comme suit : 
• Nous ne devons pas confondre la liberté avec l’arbitraire ou le pluralisme avec l’indifférence par rapport à la vérité ; 
• nous devons cultiver la vérité dans toutes nos relations au lieu de vivre dans la malhonnêteté, la ruse ou l’opportunisme ;
• nous devons constamment chercher la vérité et la sincérité incorruptibles au lieu de répandre des demi-vérités idéologiques ou partisanes ; 
• nous devons avoir le courage de servir la vérité et rester constants et fiables au lieu d’accommoder nos vies de façon opportuniste.
   
4. L’engagement en faveur d’une culture de l’égalité des droits et du partenariat entre les sexes
  
Dans toutes les régions et dans toutes les religions, d’innombrables personnes s’efforcent de mener une vie dans l’esprit du partenariat entre l’homme et la femme et d’un comportement responsable en matière d’amour, de sexualité et de famille. Et pourtant le monde d’aujourd’hui est encore plein de formes condamnables d’une mentalité patriarcale, de la domination d’un sexe sur l’autre, de l’exploitation de la femme, de l’abus sexuel de l’enfant ou de la prostitution sous la contrainte. Il n’est pas rare, surtout dans les pays moins développés, que les différences sociales aboutissent à une situation où les femmes et même les enfants cherchent dans la prostitution l’indispensable moyen d’assurer leur survie.

A. Dans les grandes et anciennes traditions religieuses et éthiques de l’humanité, nous trouvons cette injonction : tu n’auras pas de relations sexuelles illicites! Ou, dans sa version positive : respectez-vous et aimez-vous les uns les autres! Reprenons donc aujourd’hui les conséquences de cette antique directive : Personne n’a le droit de réduire l’autre au rôle de simple instrument au service de sa sexualité, de l’engager ou de le maintenir dans une situation de dépendance sexuelle.

B. Nous condamnons l’exploitation et la discrimination sexuelles comme des formes parmi les plus graves de dégradation de la personne humaine. Partout où la domination d’un sexe sur l’autre est proclamée et où l’exploitation sexuelle est tolérée – fût-ce au nom de motifs religieux –, partout où la prostitution est favorisée ou l’enfant abusé, il faut résister. Il faut être lucide : il ne peut y avoir d’humanité authentique sans une vie commune respectueuse des partenaires!

C. C’est pourquoi les jeunes doivent apprendre en famille et à l’école que la sexualité n’a rien de négatif et destructeur ; elle n’est pas une occasion d’exploitation, mais au contraire une puissance créatrice et constructive. Sa fonction est d’affirmer la vie et de constituer une communauté ; elle ne peut s’épanouir qu’en s’exerçant dans la responsabilité et l’attention au bonheur du partenaire.

D. La relation entre l’homme et la femme ne sera pas caractérisée par la mise sous tutelle ou l’exploitation de l’autre ; c’est au contraire l’amour, le partenariat et la fiabilité qui doivent l’inspirer. Le sentiment de plénitude humaine ne saurait être confondu avec le plaisir sexuel. La sexualité doit être l’expression et la confirmation d’une relation amoureuse vécue par des partenaires égaux.

Plusieurs traditions religieuses connaissent aussi l’idéal de libre renoncement à l’épanouissement complet de la sexualité. 
Pareil renoncement peut lui aussi exprimer l’identité de la personne et conférer une plénitude de sens.

E. Malgré la diversité de ses expressions culturelles et religieuses, l’institution sociale du mariage est caractérisée par l’amour, la fidélité et la permanence. Elle prétend et doit garantir à l’homme, à la femme et aux enfants protection et soutien mutuel et leur assurer leurs droits. Dans tous les pays et dans toutes les cultures, il y a lieu de promouvoir les conditions économiques et sociales qui permettent une existence digne du couple marié et de la famille, en particulier pour les personnes âgées. Les enfants ont droit à l’éducation. Les parents ne devraient pas exploiter leurs enfants, ni les enfants leurs parents. Leur relation doit être marquée plutôt d’estime, de respect et de prévenance réciproques.

F. Selon l’esprit de nos grandes traditions religieuses et éthiques, être vraiment humain se traduit comme suit : 
• Nous avons besoin de respect mutuel, de partenariat et de compréhension au lieu de la domination patriarcale ou de la relation dégradante, qui sont des manifestations de violence et provoquent souvent de la violence en retour ; 
• nous avons besoin d’attention mutuelle, de tolérance, d’une disposition à la réconciliation, d’amour au lieu de toutes les formes de désir de possession ou d’exploitation sexuelle. 

Ne peut être pratiqué à l’échelon des nations et des religions que ce qui est déjà concrètement vécu dans le cadre des relations personnelles et familiales.
  
IV. Un changement des consciences
  
Toute l’histoire en témoigne : notre Terre ne peut être transformée à moins qu’intervienne un changement des consciences, au plan des personnes comme de la société. On a pu constater qu’un tel changement est possible dans les domaines de la guerre et de la paix, de l’économie et de l’écologie, qui ont connu des évolutions radicales au cours de ces dernières décennies. Un changement semblable devrait aussi s’opérer dans le domaine de l’éthique et des valeurs. Chaque individu ne jouit pas seulement d’une dignité intrinsèque et de droits inaliénables ; il porte aussi une responsabilité inéluctable pour tout ce qu’il fait ou omet de faire. Toutes nos décisions et nos actions, tout comme nos omissions et nos échecs, entraînent des conséquences.

Aux religions incombe la tâche particulière de garder cet esprit de responsabilité en éveil, de l’approfondir et de le transmettre aux générations à venir. Nous considérons avec réalisme ce que notre consensus a permis d’obtenir ; c’est pourquoi nous insistons sur les points suivants : 

1. Dans nombre de questions particulières controversées (bioéthique, éthique sexuelle, éthique des sciences ou des médias, éthique économique ou politique), un consensus universel est difficile à réaliser. Pourtant, dans l’esprit des principes que nous venons de développer ensemble, des solutions adaptées sont à découvrir, même pour bien des questions controversées.

2. Dans de nombreux domaines, une nouvelle conscience de la responsabilité éthique s’est déjà éveillée. Aussi serionsnous heureux si autant de professions que possible (médecins, scientifiques, économistes, journalistes, politiciens...) se donnaient des codes éthiques, proposant des directives concrètes pour les questions cruciales qui se posent dans leurs domaines respectifs.

3. Nous enjoignons surtout les diverses communautés de croyants de formuler leur éthique spécifique : ce que chaque tradition religieuse peut dire à propos du sens de la vie et de la mort, de la souffrance et du pardon, sur le dévouement désintéressé ou le renoncement nécessaire, sur la compassion et la joie. Tout cela contribuera à approfondir et à préciser l’éthique planétaire déjà visible. 

Nous lançons enfin un appel à tous les habitants de cette planète : notre Terre ne saurait être changée sans un changement des consciences individuelles. Nous nous engagerons sur la voie d’une telle transformation des consciences individuelle et collective, du réveil des énergies spirituelles et de la conversion des cœurs par la réflexion, la méditation, la prière et la pensée positive. Ensemble, nous pouvons déplacer des montagnes! Sans accepter des risques et sans consentir à des sacrifices, on n’obtiendra jamais un changement fondamental de la situation actuelle! C’est pourquoi nous nous engageons en faveur d’une éthique planétaire commune, d’une meilleure compréhension réciproque, de styles de vie favorisant la paix sociale et internationale et respectueux de la nature. 

Nous invitons tous les hommes et toutes les femmes, religieux ou non, à prendre le même engagement!

Les signataires
  
Bahaïsme
Juana Conrad, Jacqueline Delahunt, Dr. Wilma Ellis, Charles Nolley, R. Leilani Smith, Yael Wurmfeld.

Brahma Kumaris
B. K. Jagdish Chander Hassija, B. K. Dadi Prakashmani.

Bouddhisme
Rev. Koshin Ogui, Sensei. Mahayana : Rev. Chung Ok Lee. Theravada : Dr. A. T. Ariyaratne, Preah Maha Ghosananda, Ajahn Phra Maha Surasak Jivanando, Dr. Chatsumarn Kabilsingh, Luang Poh Panyananda, Ven. Achahn Dr. Chuen Phangcham, Ven. Dr. Havanpola Ratanasara, Ven. Dr. Mapalagama Wipulasara Maha Thero. Vajrayana : S. S. le XIVème Dalai Lama. Zen : Prof. Masao Abe, Zen Master Seung Sahn, Rev. Samu Sunim.

Christianisme
Blouke Carus, Dr. Yvonne Delk. Anglican : Rev. Marcus Braybrooke, James Parks Morton. Orthodox : Maria Svolos Gebhard. Protestant : Dr. Thelma Adair, Martti Ahtisaari, Rev. Wesley Ariarajah, Dr. Gerald O. Barney, Dr. Nelvia M. Brady, Dr. David Breed, Rev. John Buchanan, Evêque R. Sheldon Duecker, Prof. Diana L. Eck, Dr. Leon D. Finney, Jr., Dr. James A. Forbes, Jr., Evêque Frederick C. James, Archévêque Mikko Juva, Prof. James Nelson, Dr. David Ramage, Jr., Robert Reneker, Rev. Dr. Syngman Rhee, Rev. Margaret Orr Thomas, Prof. Carl Friedrich v. Weizsäcker, Prof. Henry Wilson, Rev. Addie Wyatt. Catholique-romain : Rev. Thomas A. Baima, Cardinal Joseph Bernardin, Père Pierre- Francois de Bethune, Sœur Joan M. Chatfield MM, Rev. Theodore M. Hesburgh CSC, Abbé Timothy Kelly OSB, Jim Kenney, Prof. Hans Küng, Dolores Leakey, Sœur Joan Monica McGuire OP, Rev. Maximilian Mizzi, Dr. Robert Muller, Rev. Albert Nambiaparambil, Mgr. Placido Rodriguez, Mgr. Willy Romelus, Dorothy Savage, Frère David Steindl-Rast OSB, Frère Wayne Teasdale.

Religions indigènes
H. I. G. Bambi Baaba. Akuapim : Nana Apeadu. Yoruba : S. K. H. Oseijeman Adefunmi I, Baba Metahochi Kofi Zannu. Amerindiens : Archie Mosay, Burton Pretty On Top, Peter V. Catches.

Hindouisme
Dr. M. Aram, Jayashree Athavale-Talwarkar, S. H. Swami Chidananda Saraswati, Swami Chidananda Saraswati Muniji, Swami Dayananda Saraswati, Sadguru Sant Keshavadas, P. V. Krishnayya, Dr. Lakshmi Kumari, Amrish Mahajan, Dr. Krishna Reddy, Prof. V. Madhusudan Reddy, Swami Satchidananda, S. H. Satguru Sivaya Subramuniyaswami, S. H. Dr. Bala Siva Yogindra Maharaj. Vedanta : Pravrajika Amalaprana, Pravrajika Prabuddhaprana, Pravrajika Vivekaprana.

Jaïnisme
Dr. Rashmikant Gardi. Digambar : Narendra P. Jain. Shwetambar : S. H. Shri Atmanandji, Dipchand S. Gardi, S. E. Dr. L. M. Singhvi, S. H. Acharya Sushil Kumarji Maharaj.

Judaïsme
Helen Spector. Conservateur : Prof. Susannah Heschel. Libéral : Rabbi Herbert Bronstein, Norma U. Levitt, Rabbi Herman Schaalman, Dr. Howard A. Sulkin. Orthodoxe : Prof. Ephraim Isaac.

Islam
Tan Sri Dato Seri Ahmad Sarji bin Abdul-Hamid, Dr. Qazi Ashfaq Ahmed, Hamid Ahmed, Mazhar Ahmed, Hon. Louis Farrakhan, Dr. Hamid Abdul Hai, Mohammed A. Hai, Dr. Mohammad Hamidullah, Dr. Aziza al-Hibri, Dr. Asad Husain, Dato Dr. Haji Ismail bin Ibrahim, Dr. Irfan Ahmat Khan, Qadir H. Khan, Dr. Abdel Rahman Osman. Chiite : Prof. Seyyed Hossein Nasr. Sunnite : Imam Dawud Assad, Imam Warith Deen Mohammed, Hon. Syed Shahabuddin.

Néo-paganisme
Rev. Baronesse Cara-Marguerite-Drusilla, Rev. Deborah Ann Light, Lady Olivia Robertson.

Sikhisme
Siri Singh Sahib Bhai Sahib Harbhajan Singh Khalsa Yogiji, Bhai Mohinder Singh, Dr. Mehervan Singh, Hardial Singh, Indarjit Singh, Singh Sahib Jathedar Manjit Singh, Dr. Balwant Singh Hansra.

Taoïsme
Chungliang Al Huang.

Théosophie
Radha Burnier.

Zoroastrisme
Dastoor Dr. Kersey Antia, Dr. Homi Dhalla, Dastoor Dr. Kaikhusroo Minocher JamaspAsa, Dastoor Jehangir Oshidari, Rohinton Rivetna, Homi Taleyarkhan, Dastoor Kobad Zarolia, Dastoor Mehraban Zarthosty.

Organisations interreligieuses
Karl Berolzheimer, Dr. Daniel Gomez-Ibanez, Ma Jaya Bhagavati, Peter Laurence, Dr. Karan Singh, John B. Taylor, Rev. Robert Traer, Dr. William F. Vendley.

mercredi 8 mai 2013

Felice Varini (1952-)

Felice Varini, né en 1952 à Locarno en Suisse et résidant désormais à Paris, est loin d’être un artiste comme les autres. En effet, ces oeuvres ne peuvent ni être admirées au musée ni accrochées sur un mur car elles font littéralement partie de l’environnement où elles se trouvent. Issue d’une réelle créativité artistique, chacune des oeuvres de Varini ne peut laisser le spectateur indifférent. 

Il travaille sur l'espace, l'architecture et la vision. Son travail prend des formes spectaculaires. Ses supports sont généralement des lieux anciens à l'architecture affirmée. Ce sont généralement des espaces extérieurs sur lesquels il fait apparaître des anamorphoses qui se recomposent à un point de vue préétabli. L’ampleur de celles-ci, fougueusement déployées dans l’environnement, ne peut qu’émerveiller sans avertissement, prendre par surprise et ouvrir à la créativité.




L'ordre émerge du chaos... 




Artiste de la perspective, du point de vue, Felice écrit ceci de sa démarche :

"L’espace architectural, et tout ce qui le constitue, est mon terrain d’action. Ces espaces sont et demeurent les supports premiers de ma peinture. J’interviens in situ dans un lieu chaque fois différent et mon travail évolue en relation aux espaces que je suis amené à rencontrer.
En général je parcours le lieu en relevant son architecture, ses matériaux, son histoire et sa fonction. A partir de ses différentes données spatiales je défini un point de vue autour duquel mon intervention prend forme.

J’appelle point de vue un point de l’espace que je choisis avec précision : il est généralement situé à hauteur de mes yeux et localisé de préférence sur un passage obligé, par exemple une ouverture entre une pièce et une autre, un palier… Je n’en fais cependant pas une règle car tous les espaces n’ont pas systématiquement un parcours évident. Le choix est souvent arbitraire.
Le point de vue va fonctionner comme un point de lecture, c’est à dire comme un point de départ possible à l’approche de la peinture et de l’espace. La forme peinte est cohérente quand le spectateur se trouve au point de vue. Lorsque celui-ci sort du point de vue, le travail rencontre l’espace qui engendre une infinité de points de vue sur la forme. Ce n’est donc pas à travers ce point de vue premier que je vois le travail effectué ; celui-ci se tient dans l’ensemble des points de vues que le spectateur peut avoir sur lui.

Si j’établis un rapport particulier avec des caractéristiques architecturales qui influent sur la forme de l’installation mon travail garde toutefois son indépendance quelles que soient les architectures que je rencontre.

Je pars d’une situation réelle pour construire ma peinture. Cette réalité n’est jamais altérée, effacée ou modifiée, elle m’intéresse et elle m’attire dans toute sa complexité. Ma pratique est de travailler « ici et maintenant »".



Toutes ses oeuvres sont disponibles sur son site Web à l’adresse suivante : http://www.varini.org/ .Elles sont d’ailleurs un excellent rappel que « tout est en fonction du point de vue de l’observateur »


"Up-down" Yvonne Senouf / Projects New-York, USA, 1997


"Trois triangles bleus" Osaka Art Kaleidoscope Osaka, Japon, 2007

vendredi 3 mai 2013

Question de point de vue

Nous somme tous conditionnés par rapport à certaines croyances, certains postulats qui sont utiles à l'action humaine. Bien que la plupart de nos représentations soient construites, et que la raison humaine soit limitée, nous choisissons de lui faire confiance malgré tout. Il y a une multiplicité de points de vue, mais certains sont meilleurs que d'autres, par rapport à leur objet. Si cet objet est lié aux valeurs, c'est exactement la même chose. Cette thèse s'appelle le perspectivisme. 

Comme l'expression l'indique, le "point de vue" est la position que l'on adopte pour voir. Cela sous-entend plusieurs choses :

On ne voit pas la même chose selon que l'on adopte un point de vue ou un autre. Par exemple, si vous regardez la mer d'une montagne, ou si vous allez tremper les pieds dedans, vous ne verrez pas les mêmes détails, le même mouvement, etc. Si vous êtes dans la forêt, ou que vous regardez celle-ci d'un hélicoptère, vous ne verrez pas du tout la même chose.

Cela signifie que d'un seul point de vue, on ne peut pas tout voir. Si l'on regarde un visage de face ou de profil, on n'a pas les mêmes détails : il faut pouvoir en observer l'ensemble, et donc changer de point de vue. Aucun homme n'a de point de vue omniscient. C'est la thèse de la finitude de la raison humaine.

D'ores et déjà, on peut dire qu'il y a des points de vue "meilleurs" que d'autres, en fonction de ce que l'on regarde et éventuellement d'une finalité pratique. Prenons la métaphore de la lunette: pour regarder les étoiles, il peut être utile de se servir d'un téléscope. Par contre, pour observer des cellules, un téléscope ou l'oeil nu ne suffisent pas : on a besoin d'un microscope. En bref, selon ce que l'on veut regarder, il existe des points de vue plus pertinents que d'autres. Il faut noter que chaque point de vue possède une zone de pertinence. Pour reprendre l'exemple du tableau, on attend en général plus souvent le point de vue artistique que celui qui n'observe que le matériau. On peut grosso modo relier les points de vue à des zones de pertinence (limitées), à des domaines du savoir.

Parlons donc du point de vue qui se veut "critique" ; celui qui précisément est l'épistémologie, c'est-à-dire : le point de vue sur les points de vue, le meta point de vue. L'épistémologie, la recherche de la connaissance valide, est en ce sens la science ou l'étude des points de vue. Nous pouvons nous demander plus précisément quels sont les critères de ce point de vue. En effet, si le point de vue est une position de départ, en fonction d'un objet, il est utile de savoir quelles positions sont à rejeter ou à prôner pour "bien" voir. 

Sans doute l'erreur de ceux qui se veulent "critiques" consiste à adopter un point de vue qui se différencie d'autres points de vue qu'il rejette. Donnons directement l'illustration parfaite, en politique, où l'on confond en fait point de vue et identité : les gens s'identifient à leur point de vue, et rejettent l'autre (l'altérité) simplement parce qu'il porte une autre étiquette, alors qu'au fond, ils pensent peut-être pareil. Du moins, fort probablement, leurs points de vue pourraient opérer ensemble une synthèse. En général, ceux de droite rejettent ceux de gauche - et vice versa - pour des raisons d'identité et non d'idées. Ils se disent critiques, mais ne parviennent justement pas à prendre la distance nécessaire : ils ne font que rejeter, et nient donc l'existence de choses qu'ils ne voient pas. C'est une attitude bornée et ridicule, agissant avec des oeillères.

Il existe donc principalement un type de point de vue qu'il faut rejeter : celui qui rejette des points de vue.

En bref, le point de vue qui opte pour le rejet, la destruction et la haine est celui qu'il faut rejeter. Ici vient l'extension promise aux cultures. Tous les points de vue ne se valent pas : certains voient beaucoup moins certaines choses que d'autres et en plus, certains ne permettent pas de rendre compte des autres points de vue. Une culture qui ne propose qu'un point de vue par rapport aux valeurs, tout en rejetant les autres procède d'un dogme, à rejeter (surtout lorsqu'il est question de haine). Une culture qui ne permettrait pas d'adopter tout point de vue qui ne rejette pas les autres est mauvaise. Enfin, meilleure est la culture qui permet de synthétiser les points de vue, au lieu de les faire lutter les uns contre les autres (il en est de même pour les idéologies : est-il vraiment impossible de faire de l'économique sans faire du social ?